Décision de justice à deux vitesses: suite émouvante
Le 30 novembre, nous avons relayé la déclaration de l'UL des Syndicats CGT de la Haute-Landes.
Nous transmettons, l'article du journal Sud Ouest du 1er décembre 2017
Témoignage:
" J'écope de la double peine "
VILLENAVE Philippe Bordes est le premier malade de l'amiante débouté en appel. il va devoir rembourser l'entreprise Leroux et Lotz qui l'employait alors à la centrale EDF d'Arjuzanx . Un décision qui le laisse amer
IL n'y a travaillé que trois petits mois. Trois mois à participer au démontage d'une turbine cerclée d'amiante, à coup de burin, à la centrale d'Arjuzanx, pendant l'été 1976. Philippe Bordes travail!ait pour une entreprise sous-traitante, Leroux et Lotz (de laholding Buzard Partidpa tions), en attendant sa prise de fonction au sein de la police. Histoire de mettre de l'argent de côté en prévision de son mariage avec Viviane. Il a suffi de cette exposition ultra dangereuse à la poussière d'amiante ce matériau isolant massivement utilisé dans l'industrie et le bâtiment avant d’être interdit en 1997. Trente cinq ans plus tard , le délai moyen pour découvrir les ravages de ce mal dans le corps humains, il est diagnostique malade de l’amiante .
« Les fibres un million de fois plus fines qu’un cheveu, s’étaient installées dans mes poumons et dans la plèvre. Le calcium s’est formé autour, créant des plaques pleurales qui ne font que grossir. En 2011, elles faisaient 3 millimètres. En 2014, 8 millimètres, j’en ai 14 en tout. Et il suffit qu’une seule s’enflamme pour mourir dans quelques semaines plus tard »
Une épée de Damoclès, avec laquelle il compose tous les jours comme des milliers de Français. L'amiante serait responsable de près de 2200 nouveaux cas de cancers, et de 1700 décès par ans
Un décret arrivé trop tard
La caisse primaire d’assurance maladie à ses côtés, il attaque son ancien employeur de l’époque, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Mont de Marsan en 2012. En 2014, il obtient gain de cause. Buzard Participations doit lui verser quelques 40 000 euros, notamment pour préjudice « pour faute inexcusable » à l’origine de sa maladie
« A l’époque on ne portait pas de masque. Je mettais un mouchoir bleu sur la bouche pour m’aider à respirer c’est tout. Nous étions quatre à dé calorifuger la turbine, trois sont morts »
Mais la nouvelle est tombée il y a quelques jours : Buzard Participations qui avait fait appel de cette décision a eu gain de cause. La holding a annoncé ne pas connaître le danger qu’encourait ce salarié à l’été 1976, puisque le décret obligeant les entreprises à protéger les employés exposés à ces poussières datait de 1977. Ça se joue à une poignée de mois. C’est pourtant des années que je vais perdre ». Philippe Bordes devra rembourser le dédommagement qu’il avait obtenu « ce petit versement pour ces groupes qui pèsent si lourd. On est sonné, j’écope la double peine. Non seulement j’ai l’amiante, je ne verrai jamais mes 70 ans, mais en plus je me sens coupable d’avoir demandé l’indemnisation s’énerve le Villena vais de 61 ans. Il est le premier à être débouté. Comme il est le premier en France à avoir contracté une maladie professionnelle après un si court temps d'exposition.
Alors il pourrait "se pouvoit en cassation", oui "mais j'ai déjà payé 6000 euros de procédure. L'amiante me coûte cher". Philippe Bordes a aussi l'opportunité de se retourner vers le Fonds des victimes de l'amiante, le FIVA, "Mais non merci, on a touché le fond, là. on a déjà trop de tracas au quotidien, à se demander si je peux me permettre de faire ça, d'aller là, pour ne pas attraper une infection. Je ne vais pas repartir dans deux ans de procédure. Mon seul regret, c'est pour le futur. Avec l'indemnisation, quand la maladie s'aggrave, l'aide augmente et aurait pu aider ma femme après"
L'agent ne soulagera pas ses difficultés à porter une brouette de bois pour se chauffer, ne le réchauffera pas non plus quand il est en crise, et que son thorax affiche une sensation de 0 degré de température, même un jour de canicule. Et puis il va laisser Jean Claude Dumartin, de l'Union locale syndicale CGT de la Haute-Landes "ll fait tellement pour nous tous. Il y a sans cesse de nouveaux cas, il est là !"
Avec sa toux pour ponctuation, le syndicaliste, qui a travaillé trente trois ans sur le site, dit toute sa colère à l'annonce de la décision de la Cour d'appel de Pau "On parle de vie. Sur les 125 agents EDF d'Arjusans malades, 39 sont morts. Je ne compte pas les salariés des sous stations, imaginez. Et on demande à ces malades de s'asseoir sur le peu d'indemnisations auxquelles ils ont légalement droit ?"
Ce que ne comprennent pas Viviane et Philippe Bordes, c'est pourquoi le sous-traitant ne s'est pas, lui retourné contre EDF pour le dédommager "Cette usine n'était qu'un amas d'amiante, on en a éliminé 1000 tonnes en démontant la centrale". Ils n'auront pas la réponse !.
Reste les craintes de Philippe, son père fait lui aussi partie des 1326 gars d'Arjuzans "en quelques mois alors qu'il n'avait que deux fibres d'amiante dans le corps il est mort". Monsieur Ménot à Morcenx, allait mieux, avant de s'éteindre lui aussi. Tout ça pèse, c'est lourd de vivre avec ça lâche Viviane, l'émotion dans les yeux. Mais sans se rendre compte de l'image qu'elle emploie, elle dira quand même "heureusement nos enfants sont là, et nos petits enfants sont une vraie bouffée d'oxygène" c'est air sain dont ils auront besoin pour dépasser l'amiante
sans commentaire. . .ou plutôt si nous sommes encore scandalisés